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Kabuliwallah

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Kabuliwallah, Rabindranath TagoreKabuliwallah, Rabindranath Tagore, Zulma, 2016 (traduit par Bee Formentelli)

Kabuliwallah qui signifie un marchand ambulant ou un colporteur natif d’Afghanistan est le titre d’une nouvelle de ce recueil en plus d’être celui de tout l’ouvrage. Ces vingt-deux nouvelles écrites entre 1891 et 1895 ont été choisies, traduites et présentées par Bee Formentelli, traductrice. Trois cent soixante pages de plongée dans l’Inde de la fin XIXème, un dépaysement total en même temps qu’instructif sur ce pays encore sous la domination anglaise et très découpé en différentes castes qui ne se mêlent pas.

Rabindranath Tagore, Prix Nobel de Littérature en 1913, fut aussi compositeur, peintre et philosophe. Issu de la caste des brahmanes, il a une enfance calme et paisible, loin des tracas des Indiens qui doivent travailler pour manger. Cette situation ne l’a pourtant pas empêché de dénoncer le système qui veut qu’en Inde, les riches, les zamindars (grands propriétaires fonciers), exploitent les pauvres. C’est l’objet d’au moins une nouvelle du recueil. Beaucoup d’autres parlent du rôle de la femme, très en retrait, mariée de force très jeune et qui doit se soumettre aux volontés d’un mari pas toujours en avance sur son époque quant aux droits des femmes. Ce qui est étonnant dans ces textes, c’est l’opposition entre la relation forte qui existe entre le père et ses filles, il est souvent chamboulé lorsqu’il doit marier sa fille et la voit quitter la maison pour celle de son époux, et le peu de considération qu’ont les hommes pour leurs femmes. A croire, que mariées, elles perdent leur intérêt. Néanmoins, Rabindranath Tagore décrit beaucoup de femmes fortes, ayant du caractère et ne se laissant pas faire : elles revendiquent, osent se rebeller et résister à leurs maris, souvent pour le bien des enfants plus que pour le leur, au risque de se mettre la communauté à dos. Elles peuvent être aussi vénales, jalouses des biens des autres surtout lorsque l’homme de la maison n’aspire qu’à une vie paisible ; mais il faut dire que c’est elle qui doit faire bouillir la marmite et que sans argent ce n’est pas facile, surtout si monsieur ne veut pas travailler.

Rabindranath Tagore est réaliste, il décrit des situations envisageables voire certaines se sont produites. Son style est à la fois réaliste donc mais aussi lyrique, dans les paysages, les rêves,… Il emprunte beaucoup aux coutumes, aux contes, aux fables, à la mythologie indienne. Ses courtes histoires sont tragiques, dramatiques ou plus légères, plus enlevées,
je n’irai pas jusqu’à dire qu’elles sont primesautières même si certaines arrachent des sourires. Non, ce sont des histoires de vies qui en disent long sur l’Inde du XIXème siècle, les castes, les relations entre les pères et les filles, souvent belles et tendres, entre les pères et les fils, plus conflictuelles, le fils voulant égaler voire dépasser le père, entre les maris et les femmes, pas toujours sereines, mais parfois très profondes quand bien même les mariages ont été arrangés, entre les mères et les enfants, protectrices dans les deux sens…

Je connaissais Rabindranath Tagore, au moins son nom, mais je ne saurais dire pour quelles raisons. Maintenant, j’en ai une excellente : ses nouvelles éditées chez Zulma dans un volume divinement couvert.

Yves


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